Le retour de la F1 à Hockenheim nous replonge dans l’atmosphère étrange du Grand Prix d’Allemagne 2010, lorsque Fernando Alonso s’était imposé devant Felipe Massa après que le Brésilien eut obtempéré aux ordres de la Scuderia. Bien sûr, les consignes d’équipe étaient alors officiellement interdites par le règlement (en réaction aux excès de « Radio Todt » durant les années Schumacher) mais personne n’était dupe. L’hypocrisie fut de mise dans les interviews d’après-course, avec une langue de bois au goût amer pour Massa, dont l’attitude lors de la cérémonie du podium en disait aussi long que la mine sombre qu’il affichait ostensiblement. Ne faut-il pas chercher davantage dans cette humiliation que dans les séquelles de l’accident de Budapest en 2009 les problèmes psychologiques rencontrés par le Brésilien depuis lors ?

Deux ans sans le moindre podium pour un pilote payé 11 millions de dollars par saison, cela fait plutôt mauvais genre. Felipe n’aurait pas un contrat en béton (bien protégé par Nicolas Todt) qu’on ne donnerait pas cher de sa peau. Le malheureux incident de Budapest reste aussi dans les mémoires, car il avait démontré l’incapacité de la Scuderia à palier le forfait d’un de ses pilotes. La Ferrari Driver Academy n’a toujours pas comblé cette lacune : Sergio Pérez est sous contrat avec Sauber jusque fin 2013 et les pesos de Carlos Slim garantissent le financement des moteurs Ferrari, tandis que Jules Bianchi est encore trop tendre pour assumer une telle responsabilité. Les expériences vécues en 2009 avec Badoer et Fisichella ont souligné la difficulté d’endosser le costume de deuxième pilote de la Scuderia. Si Massa est toujours en place après son début de saison catastrophique, il le doit sans doute à ce constat.

Comme Felipe a relevé la tête depuis quelques Grands Prix, il est même question de prolonger son contrat en 2013… Faute de mieux ? Webber ayant rempilé avec Red Bull où Vettel est bien verouillé (même si les rumeurs d’un pré-contrat avec Ferrari pour 2014 sont peut-être fondées, qui sait ?), aucun candidat de premier plan ne s’impose. Lewis Hamilton négocie avec McLaren et on le voit mal servir la soupe à Alonso, même tout de rouge vêtu : les rôles seraient inversés par rapport à la situation vécue chez McLaren en 2007 (Fernando nouveau venu dans une équipe dévouée à son pilote fétiche), et sans doute les résultats aussi. Certains citent Paul di Resta (mais pourquoi Mercedes le libérerait-il ?) ou Heikki Kovalainen (pourrait-il faire mieux que Massa ?), sans y mettre beaucoup de conviction. De là à voir Massa rempiler, il y a tout de même de la marge…

Car la Scuderia est devenue un « one car team » et le championnat des constructeurs n’est plus un objectif, alors qu’il est pourtant très lucratif. Donc Felipe coûte cher en salaire et en manque à gagner ! La gestion des événements par Ferrari a été remarquable pour le Brésilien, jamais critiqué ouvertement et toujours encouragé à se remettre en question (il suivrait même une thérapie), Stefano Domenicali étant reconnu pour ses qualités humaines. Mais les intérêts de Maranello doivent également s’envisager à plus long terme, et dans cette éventualité miser sur un jeune pourrait se justifier – reste à savoir lequel. Nul doute que Fernando aura son mot à dire sur son futur ailier : l’option Webber étant rejetée, les paris sont ouverts.

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