En exclusivité pour F1i, l’ingénieur Jacky Eeckelaert, qui a travaillé pour les écuries Jordan, Prost GP, Sauber, Honda et dernièrement HRT (avant de rejoindre cette année le championnat du monde FIA d’endurance) vous livre son avis d’expert sur les Grands Prix.

Aujourd’hui, il revient pour nous sur le Grand Prix de Belgique, remporté par Jenson Button et marqué par l’accident du départ.

Bravo à Button

“A cause de l’accident du départ et de ses conséquences, on est passé un peu vite sur la victoire de Jenson Button, la quatorzième de sa carrière (comme Graham Hill, Jack Brabham et Emerson Fittipaldi). Il a vraiment dominé ce week-end de la tête et des épaules (c’est la première fois qu’il mène tous les tours d’une course depuis le Grand Prix d’Australie 2009), dès sa pole position, très nette, et puis en course, avec une stratégie à un seul arrêt relativement osée. Sur les dix premiers, seuls lui et Vettel ont tenté un passage unique par les stands. Et Jenson l’a fait en partant chaussé de médiums, c’est dire si sa McLaren était vraiment bien réglée. Les autres écuries ont sans doute manqué la bonne stratégie, même si avec une seule séance de roulage sur le sec (samedi, puisqu’il avait plu vendredi), les écuries ont eu moins de temps pour bien préparer les voitures.”

Hiérarchie technique inchangée

“Comme les usines ont dû fermer leurs portes pendant deux semaines, les écuries n’ont pas pu travailler beaucoup sur les monoplaces. La hiérarchie n’a donc pas vraiment varié : McLaren est toujours devant, alors que Red Bull, contrairement à l’an passé, est plus forte en course qu’en qualifications. Lotus est constante, même si le podium à Francorchamps doit beaucoup au talent de Kimi sur cette piste (son 68ème au total). Ses réglages l’ont beaucoup pénalisé en ligne droite (il était incapable de doubler Schumacher en ligne droite), comme si Lotus avait souffert plus que les autres de l’absence de roulage vendredi. En revanche, Mercedes ne cesse de reculer : Michael n’est dans les points que grâce à l’élimination d’Alonso, Hamilton, Grosjean et Pérez.”

Grosjean, trop impatient

“Pour moi, Romain est impatient de bien faire, et du coup en fait trop. Sa suspension d’un Grand Prix est sévère, mais elle tient compte du fait qu’il s’est trouvé impliqué dans de nombreux incidents de course : en Australie, il s’accroche au 2ème tour avec Maldonado, qui l’attaquait à l’intérieur ; en Malaisie, il touche Schumacher au 1er tour puis sort de la route au 4ème tour ; à Barcelone, il a un contact avec Pérez au premier virage ; à Monaco, il se fait toucher au départ par Alonso et par en tête-à-queue ; à Hockenheim, il heurte Senna dans le 2ème virage ; et à Spa, il s’accroche avec Hamilton, Alonso et Pérez. Il est donc impliqué dans un accident (sans être toujours responsable à 100 %) un Grand Prix sur deux : c’est trop. Du coup, il est le pilote qui a complété le moins de tours (300 km de moins que Michael Schumacher pourtant pas verni). Par contraste, on a vu son équipier réaliser à Spa de superbes dépassements à des endroits très difficiles, mais en gardant toujours un marge de sécurité. De même au départ, Kimi a parfois perdu des places mais n’a pas gâché sa course alors que tout se passe comme si Romain ne voulait pas en perdre une seule. Ça s’appelle la maturité.”

Un championnat relancé

“L’élimination d’Alonso a profité à Vettel, qui a signé une course remarquable, grâce à une bonne stratégie mais aussi à des dépassements autoritaires. Entre le 15ème et le 44ème tour, Seb’ a grignoté environ cinq secondes sur le vainqueur du jour, Button, qui lui n’a pas dû composer avec le trafic. Son retard au classement général s’est réduit à 24 points, ce qui n’est pas grand-chose étant donné qu’il reste sept courses. En en 2010, Sebastian n’occupait que le quatrième rang au classement à deux Grands Prix de la fin alors que Fernando voguait en tête avec 25 points d’avance… Et pourtant, c’est lui qui est devenu champion. Quant à Kimi, il n’est pas hors course non plus : grâce à son sixième podium de l’année, même sans victoire, il n’a que 33 points à rattraper. La constance est vraiment indispensable cette saison.

Ce qui va jouer de plus en plus, c’est la fiabilité. Logiquement, les voitures vont être de moins en moins fiables, car tous les moteurs neufs auront été utilisés à Monza et que le nombre de transmissions est également limité.”

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