En exclusivité pour F1i, l’ingénieur Jacky Eeckelaert, qui a travaillé pour les écuries Jordan, Prost GP, Sauber, Honda et dernièrement HRT (avant de rejoindre cette année le championnat du monde FIA d’endurance) vous livre son avis d’expert sur les Grands Prix.

Aujourd’hui, il revient pour nous sur le Grand Prix de Bahreïn, remporté par Sebastian Vettel devant Kimi Räikkönen et Romain Grosjean.

Red Bull s’impose, mais avec une faible marge

 “Vettel a franchi la ligne d’arrivée avec 3,333 secondes d’avance sur Räikkönen, ce qui n’est pas énorme quand on y réfléchit. D’accord, sur le papier, Sebastian a réalisé un ‘hat-trick’, un ‘coup de chapeau’ comme on dit en anglais (soit la pole position, la victoire et le meilleur tour en course), mais il n’a pas dominé outrageusement les Lotus : derrière Kimi, Grosjean n’est qu’à une dizaine de secondes. On est loin des échappées solitaires de Vettel auxquelles on assistait il y a un an. Il a fallu attendre quatre courses pour que Red Bull exploite le plein potentiel d’une machine qui, à ses débuts, était rapide mais nerveuse. Après quatre courses, quatre pilotes différents (Button, Alonso, Rosberg et Vettel), d’écuries elles aussi différentes, se sont imposés. Autre preuve que les écarts se resserrent dans tout le peloton : en Q1, il y avait dix-huit voitures regroupées en une seconde ! Ce qui confirme le niveau de compétitivité général et l’importance d’être régulier. Le championnat va être passionnant !”

Grosjean a les qualités des tout bons

 “A Bahreïn, Lotus a enfin concrétisé son grand potentiel, grâce à deux pilotes remarquables. Sur le papier, le duo Kimi-Romain a pourtant moins de bouteille que les tandems de McLaren, Red Bull, Mercedes ou Ferrari. Mais sur le papier seulement. Mon Finlandais préféré, que j’ai connu chez Sauber quand il débutait sa carrière, n’a rien perdu de son talent, ni de son envie de vaincre. Quand je pense que certains ont mis en doute sa motivation… ! Quant à Romain, je me rappelle qu’en 2009, il se qualifiait à environ quatre dixièmes de son équipier de l’époque, Fernando Alonso. Plutôt pas mal ! Romain possède les qualités des tout bons pilotes : il a la vitesse, mais aussi la régularité en course, et prend des départs incroyables. En Malaisie aussi, il a décollé dès les premiers mètres. Son écart à l’arrivée avec Kimi s’explique par le fait que l’écurie a chaque fois fait rentrer Räikkönen au meilleur moment, sans doute parce qu’elle pensait qu’il était mieux à même d’aller chercher Vettel.”

Di Resta a mis la gomme

“Paul di Resta a réalisé une excellente course (il termine sixième) en prenant le risque d’une stratégie à deux arrêts seulement. C’est le seul à avoir fait ce pari, et à l’avoir tenu, car il n’était pas simple de ménager ses gommes sur cette piste abrasive et brûlante. On savait Pérez capable de préserver ses pneus, on a découvert un autre expert en la matière à Sakhir. Paul fait un très bon début de championnat, car il a déjà quinze points à son compteur, alors qu’il n’en avait inscrit que deux l’an passé sur quatre premiers Grands Prix de la saison.”

Schumacher regrette ses Bridgestone en bois

“On le sait, la fenêtre d’exploitation des Pirelli est très réduite cette année : un écart de 10-15°C par rapport à la température de fonctionnement optimale suffit à faire chuter brutalement leur performance. Quand j’entends Schumacher se plaindre de l’importance prise par les pneus cette saison, je me dis qu’il regrette les Bridgestone qu’il a connus dans la première partie de sa carrière, chez Ferrari. A l’époque, un Grand Prix, c’était trois courses de sprint d’affilée à fond, car les pneus étaient plus constants, presque indestructibles. Pirelli a choisi une autre philosophie, en élaborant un pneu qui se dégrade volontairement vite. Ce qui a apporté beaucoup plus de spectacle sur la piste, on ne va pas s’en plaindre !”

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