A Bahreïn, la RB8 présentait une évolution discrète, mais qui a probablement débloqué son potentiel. En un mot, les ingénieurs de Milton Keynes y ont supprimé le trou où s’engouffrait l’air longeant la partie inférieure des pontons. Cette fente faisait partie intégrante de la version bis de la Red Bull, apparue lors des derniers jours de test à Barcelone (cette spécification remplaçait un dessin plus classique, comme nous l’avons expliqué par ailleurs).

Pour faire simple, le flux d’air circulant dans cette zone complexe de la voiture emprunte deux chemins sur la Red Bull.

Au-dessus des pontons

On l’a expliqué par ailleurs, la Red Bull utilise le flux d’air courant sur les pontons pour “écraser” et plier les gaz d’échappement expulsés. Autrement dit, les gaz, au lieu d’être rejetés vers le haut, sont courbés par la force du flux passant sur les pontons. Placer les sorties d’échappement à cet endroit permet de forcer les gaz à suivre une direction précise : le diffuseur est ainsi alimenté en air chaud et rapide. Voilà pour le haut…

Le long de la partie inférieure des pontons

Le défaut de ce dessin est que l’air qui longe la partie inférieure des pontons (à la base des lettres du logo “RED BULL”) est obstrué par la rampe sur laquelle glissent les gaz d’échappement. Pour résoudre ce problème, Newey et ses hommes ont tout simplement pratiqué une ouverture à la toute fin des pontons. L’air qui pénètre dans ce trou emprunte ensuite un tunnel interne, qui le mène vers le centre du diffuseur (voir dessin 1). McLaren a cherché à obtenir le même effet avec ses curieuses “bosses” au niveau des échappements : profiter des gaz d’échappement, sans barrer le passage du flux d’air inférieur.

Avant Bahreïn : l’air longeant les pontons (flèches bleues) pénètre dans une ouverture pratiquée dans la carrosserie (indication verte) et emprunte un tunnel débouchant au centre du diffuseur. Les gaz d’échappement (flèche rouge) sont eux guidés vers le diffuseur grâce à l’effet de Coanda).

Une complication imprévue

Séduisante sur le papier, cette solution s’est cependant avérée aléatoire une fois mise sur la piste. Lors du fameux comparatif mené en Chine (Vettel roulant avec la spécification de Jerez, Webber avec la nouvelle), l’écurie a utilisé sur la voiture de l’Australien de la peinture fluorescente afin de visualiser le chemin suivi par l’air lorsque celui-ci s’engouffre dans le tunnel (voir la photographie ci-dessus). Et là, surprise ! Les ingénieurs ont découvert que l’air n’empruntait pas la route prévue et n’accélérait dès lors pas le flux aérodynamique au centre du diffuseur comme espéré, ce qui avait pour effet de déséquilibrer la voiture (comme s’en plaignait régulièrement Vettel). Il leur a fallu admettre que la zone centrale du diffuseur fonctionnait mieux si le trou était bouché… Entre leurs hypothèses théoriques formulées à l’usine et le verdict de la piste, il y avait donc un écart certain.

A Bahreïn : l’ouverture a disparu. Elle a été bouchée (indication verte), de sorte que l’air (flèches bleues) rejoint directement le diffuseur, en même temps que les gaz d’échappement expulsés (flèches rouges). Le chemin suivi par le flux aérodynamique est moins complexe.

La simplicité d’abord

A Bahreïn, les ingénieurs de Red Bull ont donc préféré renoncer à un dessin sophistiqué qui amenait finalement plus d’inconvénients que d’avantages. Ils ont donc purement et simplement bouché l’ouverture au bas des pontons et condamné le tunnel (voir le dessin 2 ci-dessus). Dans cette configuration simplifiée, le chemin que doit suivre le flux d’air est plus simple, et l’appui induit par l’exploitation des gaz d’échappement plus constant. A Sakhir, Vettel et Webber ont eu à leur disposition une machine au comportement plus stable, moins sensible à la position de la pédale des gaz.

Certes, les températures exceptionnellement élevées dans le désert Bahreïn ont eu une influence sur les performances des diverses monoplaces, mais ce “détail” technique rectifié par Red Bull pourrait bien remettre en selle l’écurie qui a signé douze victoires et dix-huit pole positions l’an passé… L’ogre Vettel serait-il de retour ?

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