Le rôle des pilotes d’essais, qu’ils soient fringants gaillards ou, en l’occurrence, jolie blonde, reste encore injustement méconnu. Ces personnages de deuxième plan abattent pourtant un boulot de première importance, teinté de tous les aléas que le mot « essai » suppose :  les attentes, la répétitivité, les exigences, un certain anonymat, des risques. Que l’un ou l’autre se blesse, et l’émoi inonde l’équipe entière, voire le paddock dans son ensemble, très au fait, eux, du professionnalisme indispensable à cette fonction. Et qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme, peu importe ? Cela change tout, au contraire.

D’abord, la nature humaine est encore ainsi faite, dans les générations courantes, que l’image de l’homme reste, malgré tout ce qui a pu se dire ou se produire, celle d’un grand enfant, casse-cou à ses heures, tandis que la femme cacherait plutôt, bien ou mal, sa vocation première de douce infirmière. Si la réalité s’oppose à l’imaginaire, c’est, assume-t-on, qu’il y a eu maldonne, erreur de parcours ou, à la rigueur, influence exagérée du parent de sexe opposé. Comme dans ce cas.

N’empêche. Toute fille de champion qu’elle soit, Maria de Villota a dû, c’est évident, doublement épater la galerie en tant que pilote automobile pour se faire engager dans le monde très masculin – masculin, pas spécialement machiste – de la Formule 1.  La voir happée dès ses débuts paraît donc d’autant plus injuste.  C’est comme si tout était à recommencer, alors que tellement a déjà été accompli.

Ensuite, son accident, en l’état actuel de l’enquête, paraît inexplicable. Elle a dû, néanmoins, vivre au ralenti et en pleine conscience les secondes qui l’ont projetée contre le maudit camion. Elle a dû paniquer, bien sûr, mais sans doute, comme toute femme dans une situation semblable, pas pour sa propre santé, mais pour les sentiments et souffrances à venir de ses proches. C’est pourtant elle qui, maintenant, souffre.

Enfin, pourquoi le nier ?, la jeune pilote espagnole est aussi très belle. Ce n’est pas cette qualité-là qui lui a ouvert les portes de la F1, mais elle sûrement renforcé sa renommée. Injuste, encore : alors que les cicatrices d’un homme font souvent craquer les femmes ( à l’instinct d’infirmière, donc), celles d’une femme, a priori d’une icône, l’abîment, hélas. Tout le monde a pensé que c’était très dommage. Les hommes comme les femmes.

Le plus rageant, dans tout cela ? Déjà les premières séquelles annoncées, notamment à la vue de la pilote, contribuent à faire douter d’une reprise de carrière, en tout cas prochainement. Maria de Villota, la pionnière, la souriante, la pilote qualifiée, la bienvenu, risque de rester dans les souvenirs, très injustement, comme celle qui aura essayé.

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