Produire un châssis de Formule 1 réclame douze mois de travail, depuis les premières réflexions à l’usine jusqu’aux essais hivernaux à Barcelone. Dans ce troisième épisode de notre série, Nick Chester, le directeur technique chargé du châssis chez Renault, explique les étapes et les outils de la phase de design.

DOUBLE CONTRAINTE

Après avoir élaboré le c oncept global de la monoplace de Formule 1 et établi un calendrier de production, les ingénieurs vont dessiner chacune des 20 000 pièces qui composent une Formule 1. Vaste programme !

En schématisant, la phase de design des éléments non mécaniques (carrosserie, monocoque, etc.) doit intégrer deux contraintes : les volumes (afin de produire une aérodynamique efficace) et la rigidité (pour obtenir une structure solide).

Ces deux paramètres prennent plus ou moins d’importance selon que la pièce soit externe (carrosserie) ou interne (monocoque). Un aileron avant, par exemple, doit présenter une certaine géométrie, choisie pour la performance aérodynamique, mais elle doit présenter une rigidité suffisante.

Les pièces mécaniques (amortisseurs, direction, transmission, freins…) obéissent bien sûr à d’autres impératifs (fonction, rigidité, poids minimal), que nous n’examinerons pas ici.

© Renault F1

FORMES

Pour sculpter les formes d’une F1, les aérodynamiciens ont deux outils à leur disposition : la soufflerie et la CFD (pour “computational fluid dynamics”).

La CFD, ou mécanique des fluides numérique, est une sorte de soufflerie virtuelle, qui permet notamment de visualiser et de quantifier les différents flux s’écoulant sur la carrosserie. En simplifiant, les aérodynamiciens se servent de la CFD pour tester leurs idées : les dessins les plus prometteurs sont transformés en maquettes et passés en soufflerie pour évaluation.

La soufflerie n’offre pas les mêmes possibilités de visualisation que la CFD (elle renseigne des chiffres pour un certain nombre de capteurs), mais elle la complète en ce qu’elle est un outil expérimental et pas seulement virtuel. Dans le tunnel, une maquette à l’échelle 60 % est placée dans différentes attitudes : en plongée pour reproduire les freinages, avec du roulis pour simuler les virages, etc. Le tunnel est doté d’un tapis roulant, qui simule l’effet du déplacement de la monoplace sur la piste. Les aérodynamiciens cherchent en effet à générer une charge stable dans un grand nombre de situations plutôt qu’un appui élevé dans une fenêtre d’exploitation très réduite.

Une fois les volumes arrêtés, on passe au dessin détaillé de la voiture en utilisant la CAO, la conception assistée par ordinateur, selon un processus de continuels allers et retours entre les différents niveaux d’analyse (aérodynamique, rigidité structurelle et design détaillé). Car pour dessiner une pièce, il faut non seulement considérer les principes aéros, mais aussi prendre en compte les contraintes de rigidité et de poids.

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