En Formule 1, la course se joue souvent dans les coulisses, comme en témoigne la lettre envoyée à la FIA par Ferrari à propos d’une suspension stockant l’énergie, telle que l’aurait développée Mercedes et sans doute Red Bull. Explications.

© F1i

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PLUS QU’UNE SIMPLE SUSPENSION

Depuis l’interdiction des suspensions interconnectées en 2014, toutes les écuries travaillent sur l’amortisseur de plongée, aussi dénommé “troisième élément de suspension” (les deux autres étant, pour simplifier, les amortisseurs liés à chaque roue).

En connectant les roues avant gauche et droite, cet amortisseur contrôle la plongée de la monoplace au freinage (ou sous l’effet de l’appui), ainsi que la hauteur de caisse. En d’autres termes, il renforce la fermeté des amortisseurs lorsque cela est nécessaire (à haute vitesse, quand la charge aérodynamique augmente) mais reste neutre en virage. Ce qui signifie qu’il influence le positionnement de l’aileron avant par rapport à la piste ainsi que le maintien de l’assiette de la voiture (en empêchant qu’elle ne plonge du nez, car dans ce cas le séparateur frotterait le bitume, usant la plaque en bois au-delà de la tolérance prévue par le règlement, etc.). Ce genre d’élément joue donc un rôle déterminant dans l’efficacité aérodynamique de la monoplace, au-delà de sa simple fonction dans le système de suspension. Si toutes les écuries utilisent cet amortisseur central, Mercedes et Red Bull seraient les seules à le combiner avec une activation hydraulique.

Ce genre d’élément peut donc jouer un rôle déterminant dans l’efficacité aérodynamique de la monoplace, au-delà de sa simple fonction de suspension.

Le débat a ressurgi à la suite d’une lettre envoyée avant Noël par Ferrari à la FIA. L’ingénieur en chef Simone Resta y écrit que son écurie envisage d’installer un système capable de reproduire les effets d’une suspension interconnectée (FRIC pour “ Front and Rear Inter Connected”) mais sans connexion entre l’avant et l’arrière.

UNE LETTRE POUR DEMANDER LA SUSPENSION ?

La description du système, qui semble exposer la suspension de la W07, suggère que la lettre est destinée moins à recevoir l’approbation de Charlie Whiting qu’à faire condamner un dispositif en vigueur chez Mercedes et, sans doute, chez Red Bull. Comment comprendre, en effet, que cette lettre ait été adressée aussi tardivement, à moins de huit semaines des premiers essais hivernaux ?

“Nous sommes en train d’étudier une série de pièces de suspension qui, à notre avis, pourraient améliorer les performances en produisant une réaction qui soit plus qu’une simple réponse en  fonction de la charge appliquée aux roues telle qu’elle peut être obtenue par une simple combinaison de ressorts, amortisseurs et inerters, écrit Resta cité par le site Autosport. […] Leur contribution à la fonction première d’une suspension – l’attachement des roues à la voiture d’une manière qui isole l’amortisseur des chocs de la route – est minime, alors que leur effet sur la hauteur de caisse et, dès lors, sur la performance aérodynamique est bien plus grand, au point que nous pensons qu’un tel système justifie un poids supplémentaire et un dessin très complexe. Nous interrogeons par conséquent la légalité d’un tel dispositif à la lumière de l’article 3.15 […].

Paddy Lowe, le directeur exécutif (technique) de Mercedes, avait admis l’an passé que le but du dispositif, autorisé par la FIA jusqu’à présent, est en bonne partie aérodynamique, comme il l’avait expliqué à notre confrère Mark Hugues :

“L’interdiction du FRIC nous a forcés à essayer de faire une chose à la fois et à travailler sur les ressorts et les amortisseurs de telle sorte qu’ils réagissent à la charge d’une manière plus complexe. [Auparavant], un ressort se déformait linéairement, mais nous sommes maintenant capables de jouer avec une gamme de flexibilité non linéaire beaucoup plus grande et plus sophistiquée. Cela nous permet de régler la plate-forme aérodynamique de la voiture exactement comme nous le voulons. C’est plus compliqué à faire qu’avec le FRIC, mais c’est la même chose, en réalité. Nous disposons d’une gamme de paramètres que nous modifions en fonction des circuits, qui ont chacun des exigences particulières. Il s’agit de jouer sur les aspects aérodynamique et mécanique de la suspension.”

© Ferrari, Mercedes & F1i

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